Journées techniques de la CS3D à la Baule : le compte-rendu
16 novembre 2023 à 10:00:00
L’édition 2023 des Journées techniques de la CS3D a eu lieu les 5 et 6 octobre à la Baule. Plus de 200 participants étaient réunis pour deux jours de conférences qui portaient sur deux grands thèmes : la boîte à outils des techniciens et la professionnalisation du métier.
Biocides : les questions réglementaires
Les Journées techniques ont commencé par des questions réglementaires autour des rodonticides, des insecticides et des répulsifs et appâts. La table ronde fabricants a été animée par Gabrielle Cor, Vincent Ergen et Arnaud Del Valle qui ont chacun fait un focus. S’en est suivie une série de questions réponses avec le public.
Les points abordés étaient assez techniques et l’on comprend pourquoi les metteurs sur le marché nécessitent un service dédié à la réglementation. Le public attentif a posé des questions à propos des résultats des changements et challenges réglementaires qui semblent se décider en haut lieu mais qui deviennent tangibles sur le terrain. Sur la table notamment, les pièges mécaniques comme option valable pour remplacer les souricides dans la gestion des souris en intérieur. Cela ne veut évidemment pas dire que les souricides seront interdits, mais il faut suivre cette affaire de près !
Hygiène publique : une autre vision du métier
Ensuite Sergio Monge, président de l’association nationale espagnole Anecpla, a fait une intervention très remarquée. Il a présenté la façon dont le syndicat et l’ensemble de la profession espagnole ont réussi à transformer la vision du métier. Si l’applicateur avait par le passé 60 heures de formation, l’acteur de la santé publique qu’il est devenu aujourd’hui compte 360 heures, sans compter 300 heures nécessaire à la protection du bois et les 360 heures pour le contrôle des volatiles. Nous y revenons dans la suite de cet article. Et l’association nationale entend augmenter ce nombre d’heures. L’objectif est que la formation professionnelle atteigne un niveau moyen pour exercer un métier qui se trouve dans la professionnalisation de même niveau que l’univers de la sécurité et de l’environnement, mais dédiée à la santé et l'hygiène publiques.
La CS3D avait déjà présenté aux adhérents lors d’un précédent événement la vidéo promotionnelle de l’Anecpla – une vidéo qui soulève vraiment l’émotion sur spectateur et qui est visible sur YouTube (actionnez les sous-titres automatiques). Ce fut l’occasion de revisionner avec plaisir ce clip où chacun comprend l’importance des métiers de l’ombre comme celui de la gestion du risque nuisible. Et ce fut sans aucun doute l’occasion pour chacun de ressentir une grande fierté. C’était le but de ce film. Mission accomplie !
Ce même message a été repris par Serge Simon qui a fait une intervention sur le rôle du PCO en tant qu’acteur de la santé publique. Il semblerait que les professionnels, à l’instar d’Anecpla, et très certainement partout en Europe, veuillent une reconnaissance incontestable du secteur, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. La crise Covid, où la question des professions essentielles et non essentielles s’est posée à grande échelle pour la première fois, a mis un coup de projecteur sur cette question. Mais outre la crise Covid, la méfiance de certains clients, victimes d’arnaques – ou craignant de l’être – de la part de confrères peu scrupuleux, perpétue une mauvaise image du métier. Tout comme une communication parfois calamiteuse sur les réseaux sociaux et jusque sur les plateaux de télé, où l’on voit circuler des hérésies protocolaires ou des images choquantes, jette le discrédit sur la profession.
Entreprise de gestion du risque nuisible : comment soigner son image
Ce fut d’ailleurs le sujet présenté par Eve-Marie Laporte, de l’agence de communication choisie par la CS3D (Shan). Les prestaires de service ont la chance de faire partie d’une entreprise de mission, ou d’en être le gérant ? Qu’ils le fassent savoir via notamment les réseaux sociaux, où les personnes peuvent maitriser de A à Z leur communication, visuelle ou écrite.
Le choix des images est donc crucial, tout autant que le choix des mots. Certains prestataires l’ont bien compris d’ailleurs. Ils ne montrent jamais une souris collée sur une plaque de glu, ni une multitude de rats morts noyés dans un piège multi-capture. Ils ne parlent jamais de pest control mais de pest management… Car oui, en français même le mot « nuisible » devient problématique. On parle désormais plutôt d’espèce envahissante ou d’espèce invasive. On parle préférablement de gestion du risque nuisible, plutôt que lutte anti-nuisibles.
On souhaite désormais implémenter la notion d’acteur de la santé publique, pour ne plus évoquer l’applicateur, terme qui réduit le technicien à un applicateur de produits biocides et fait l’impasse sur l’ensemble complexe de sa boite à outils et notamment les notions de diagnostic, de monitoring, de prévention…
En d’autres termes : le métier ne doit plus se réduire à la boite à outils du technicien. Il doit évoquer en premier lieu son objectif, non pas les moyens utilisés pour atteindre celui-ci.
Prestaires de services : comment bien travailler
Et pour assoir ce propos qui a retenti durant ces deux jours, Daniel Lucien a fait une intervention sur la définition de l’IPM – Integrated Pest Management, autrement dit la gestion intégrée. C’est l’un des leviers pour exercer la profession dans les règles de l’art, de manière responsable et efficace. C’est ce que préconise aussi la norme EN 16636, qui permet l’obtention de la certification CEPA.
À l’heure où l’on note des disparités drastiques en Europe entre des professionnels formés avec plusieurs centaines d’heures et des professionnels très insuffisamment formés, la certification CEPA est la seule démarche harmonisée qui met tout le monde d’accord. Toutes les entreprises certifiées CEPA travaillent selon le même modèle. Et c’est un autre levier pour démontrer aux clients, aux autorités, aux médias également… que le métier est organisé et travaille de concert dans un seul et même sens : la protection de la santé publique.
À ce propos, Stéphane Samolej a présenté le Guide CEPA facile proposé par la CS3D. Pourquoi un tel guide ? Pour soutenir la certification CEPA, la CS3D la rend obligatoire pour tous ces adhérents à partir d’avril 2024. Le Guide CEPA facile est là pour rassurer les entreprises qui se retrouveraient démunies par le CEPA Certified.
Pour compléter ces thèmes, Thierry Beulé et Gilles Koegler ont expliqué les tenants et les aboutissants de la gestion des déchets, qui est selon eux bien plus qu’une obligation réglementaire. Ce fut l’occasion d’insister sur les inspections de la DREAL, qui se multiplient parmi les entreprises de gestion du risque nuisible.
Les inspecteurs ne contrôlent pas uniquement tous les certibiocides mais aussi la gestion correcte des déchets. Attention, la DREAL vérifie aussi (entres autres choses) :
• si les produits biocides utilisés disposent d’une AMM en France ou sont en phase transitoire,
• si les déclarations des produits mis sur le marché sur le site Biocid,
• le respect des dispositions de l’AMM et/ou FDS,
• l’absence de produits périmés en stock,
• et l’étiquetage des produits.
Formation en maitrise des nuisibles : un puissant levier de reconnaissance professionnelle
Autre levier de professionnalisation pour atteindre une reconnaissance du métier : la formation !
Le nouveau certibiocide
Le certibiocide 2024 a été présenté par Nicolas Didych et Pascal Gacel. À cette occasion, on apprend que :
• la déclaration annuelle de l’entreprise doit se faire avant le 31 mars de chaque année avec téléchargement possible d’une attestation sur l’application : https://certibiocide.din.developpement-durable.gouv.fr/entreprises/ (attention, la DREAL vérifie systématiquement ce point en cas de contrôle !) ;
• la période de compagnonnage d’un non titulaire d’un certibiocide par une personne disposant d’un certibiocide valide est prolongée à 6 mois ;
• les personnes concernées par le certibiocide des TP 2, 3, 4 et 21 disposent d’un an pour se mettre en conformité ;
• la passerelle du certiphyto vers une formation d’une journée en certibiocide disparait au 1er janvier 2024.
Les CQP
Et on ne peut pas parler de formation sans parler des CQP (Certificats de qualification professionnelle), désormais accessibles par le biais de la VAE (Validation des acquis d’expérience). Guy-André Lemoine a présenté le sujet. Nous vous renvoyons pour ça à la lecture de son article complet CQP Maitrise des nuisibles : enfin un diplôme, paru sur Hamelin Info. Il y détaille tout ce que vous devez savoir sur cette question.
Myriam Milleret, de la société Ecolab, a quant à elle apporté son témoignage sur les CQP qui ont été organisés par l’ISTAV dans le cadre de l’accès à l’emploi et qui ont permis à Ecolab de réaliser plusieurs embauches.
La boite à outils du technicien applicateur : un moyen, pas une fin !
Il est souvent question de boite à outils et plusieurs interventions y étaient donc dédiées.
Le thème de la résistance aux AVK a été traité par Romain Lasseur. Gilles Garampon a pour sa part traité la résistance aux insecticides. Face à ces problématiques, quelles alternatives sont à disposition des techniciens et techniciennes ?
Contre les volatiles et les rongeurs, on peut citer la bioprédation par les rapaces, autres volatiles et chauves-souris. Ce thème a été présenté par Timothée Josselin et Philippe Pin. Cette bioprédation permet de réguler les rongeurs à l’extérieur des locaux (rat brun, mulot et campagnols) ainsi que les insectes volants et les chenilles processionnaires.
Restons un instant avec les insectes volants ! Benoît Cottin et Vincent Ergen ont évoqué la lutte contre les moustiques avec un focus sur le piégeage des adultes.
Côté insectes rampants, Alexandra Bour a parlé de l’utilisation du dioxyde de silicium – la terre de diatomées – dans la gestion de la punaise de lit. La société Ô Punaise a apporté son témoignage puisque c’est le seul insecticide qu’elle utilise dans ses protocoles qui, selon elle, aboutissent cependant à des éradications totales des infestations de punaises de lit.
Patrick Seror et Ivan Rimbaud ont témoigné sur la mise en place d’un bon proofing rongeurs/insectes. Les deux hommes insistent. L’herméticité répond à :
• une réglementation de plus en plus contraignante,
• des exigences clients en termes d’efficacité,
• et une conscience sociétale des clients.
Et selon eux, elle est l’occasion de mettre en exergue :
• la professionnalisation de nos métiers,
• l’évolution de notre boite à outils,
• et la création de valeurs.
Enfin, Romain Lasseur a présenté la fourmi de feu, une nouvelle espèce invasive qui fait parler d’elle récemment.
Compte-rendu réalisé pour la CS3D par Hélène Frontier.